- Il était une fois, un vote, une défaite, une plainte, une annulation et un nouveau vote
Que s’est-il passé au Kenya ? Le pays a organisé le 8 août 2017 des élections législatives et présidentielles. Pour la troisième fois en 10 ans, les principaux candidats étaient Uhuru Kenyatta du Jubilee Party, et Raila Odinga du Orange Democratic Movement. En 2007, les élections étaient marquées par de grandes violences provoquant la mort de près de 1 300 Kenyans. Dix ans plus tard, U. Kenyatta, Président sortant, était réélu officiellement avec 54,27% des votes. Plusieurs incidents ont été rapportés autour des élections cette fois encore. R. Odinga, (44,74%), a déposé une plainte auprès de la Cour Suprême. Cette plainte était axée sur des problèmes liées à la transmission des résultats par la commission électorale. Le 1er septembre, le Président de la Cour Suprême annonçait l’annulation des résultats pour irrégularités dans leur transmission par la commission électorale. La décision détaillée devrait être rendue publique sous 21 jours et les élections organisées à nouveau sous 60 jours, d’ici à la fin du mois d’octobre 2017.
Cette décision a un écho retentissant en Afrique et au-delà au caractère indéniablement historique pour l’état de droit.
U. Kenyatta a déclaré qu’il acceptait la décision bien qu’il ne soit pas d’accord avec celle-ci. R. Odinga a célébré la décision tout en maintenant la pression sur la commission électorale.
Le Kenya est l’un des 15 pays africains organisant des élections en 2017
Pour un regard rapide sur les autres élections, c’est là
- Les résultats sont annulés mais rien ne prouve qu’ils n’étaient pas corrects
La commission électorale a insisté publiquement sur le fait que le problème portait sur la transmission des résultats mais pas sur les activités de vote ou le décompte. Elle a aussi déclaré qu’elle enquêterait sur ces problèmes. La Cour Suprême n’a pas déclaré R. Odinga comme vainqueur. La Cour s’est concentrée sur un aspect technique. Cependant, la crédibilité de la commission électorale est entachée. Il y a un débat sur l’état de droit et la légitimité du vote. La commission électorale devra travailler dur pour regagner la confiance des Kenyans pour assurer la crédibilité du nouveau vote. En juillet 2017, Chris Msando de la commission électorale était retrouvé assassiné et apparemment torturé. Son département au sein de la commission s’occupait de l’identification des électeurs et de la transmission du résultat.
- Quid des observations électorales ?
La décision historique de la Cour Suprême soulève plusieurs questions sur le rôle des observations électorales. Aucune des grandes missions (Union africaine, Union européenne, Fondation Carter, etc.) ne semble avoir anticipé la décision de la Cour. A première vue, cela semble renforcer les arguments contre l’utilité de ces missions. Cette situation révèle une faiblesse certaine de l’observation électorale. Cet évènement devrait être étudié en détails et fournir des leçons.
- Il est important de rester patient…
La Cour Suprême va fournir une décision détaillée d’ici au 22 septembre 2017. Les arguments politiques du camp Kenyatta insiste sur la non-remise en cause des résultats et de la victoire du Président sortant, tandis que le camp Odinga présente la décision comme la preuve que le processus électoral était dans son ensemble décrédibilisé et que leur favori était le véritable vainqueur des élections du mois d’août.
- …et de garder son calme
De nombreux incidents violents ont été rapportés en août. La nouvelle période qui s’ouvre au Kenya est extrêmement tendue. Des politiciens et des militants au sang-froid seront nécessaires pour que cette phase soit pacifique.